Traduit de l’arabe par Dunya Mikhail
(L’anglais suit l’arabe ci-dessous.)
«Le capital vole le temps», a déclaré le poète Dionne Brand dans Une conversation avec le savant Rinaldo Walcott mardi, et ce refrain a été en boucle dans mon esprit. Au milieu de l’accumulation de grandes peines qui caractérisent notre présent, il est particulièrement frappant de voir à quel point le capital nous refuse le temps du deuil, de la disparition. Là où le chagrin articule la question – l’important – de la perte, le capitalisme érode le deuil pour autoriser sa pulsion de mort. Le deuil refuse le présentisme implacable du capitalisme et ouvre sur un ailleurs – un ailleurs que touche le poème sans titre de Dunya Mikhail.
«Dans mon voyage à la recherche de / où est passé le temps, / j’ai passé la moitié de ma vie», écrit Mikhail. Chaque mot chante dans le poème clair et épars de Mikhail; mais c’est le mot «dépensé» auquel je reviens sans cesse. Ici, la vie est «dépensée» non pas à la poursuite de la prétention de maîtriser le temps, mais à l’errance après lui – la poussée vers l’avant de l’accumulation supplantée par une perte dispersée. Le locuteur ici diminue vers l’absence en cherchant quelqu’un qui lui manque. (Qui? Un bien-aimé perdu? Un ancien moi?) Et, n’est-ce pas aussi comment une bougie est dépensée? Un décroissant attrapant l’air. Dans la convergence des absences: Bref léger, peu de chemin.
– Claire Schwartz
قصيدة بلا عنوان
قالوا: الزمن لا يمضي
هو فقط يذهب إلى مكان آخر
.مثل كلبٍ ضلَّ طريقَه
في رحلتي للبحث عن المكان
الذي ذهبَ إليه الزمن
، أنفقتُ نصفَ عمري
وفي يوم وأنا أتجوّل
: سمعتُ صوتَ الزمن
لا أحدَ يُمكنهُ أن يلحقَ بي
فلماذا تحاولين ذلك؟
.قلتُ: لأنك تُشبه شخصاً أفتقدهُ
Sans titre
Ils ont dit: Le temps ne passe pas.
Ça ne va qu’à un autre endroit
comme un chien qui perd son chemin.
Dans mon voyage à la recherche de
où le temps est passé,
J’ai passé la moitié de ma vie.
Un jour, alors que j’errais,
J’ai entendu la voix de Time:
Personne ne peut me suivre,
alors pourquoi essayez-vous?
J’ai dit: Parce que tu ressembles à quelqu’un qui me manque.
Dunya Mikhail est un auteur irako-américain. New Directions a publié ses livres Dans son signe féminin (2019), L’apiculteur (2018), Les nuits irakiennes (2014), Journal d’une vague hors de la mer (2009), et La guerre fonctionne dur (2005).